Entretien avec Belkacem Hadjadj : «Nous ne traitons pas assez de notre histoire»
Il a réalisé de nombreux films, dont «Fadhma N’Soumer», «Bouzaine El Kalai», «El Manara» et «Machaho». Belkacem Hadjadj, également acteur, revient, dans cet entretien, sur l’importance du développement de l’industrie cinématographique pour la préservation de la mémoire collective et de l’histoire. Il souligne l’importance du respect des faits historiques et du recours à la fiction là où l’histoire ne fournit pas de détails précis et plaide pour le traitement de toutes les périodes historiques. Il insiste enfin sur la mobilisation de grands moyens humains et financiers.
Vous avez réalisé deux films à connotation historique, «Fadhma N’Soumer» et «Bouziane El Kalai». Comment percevez-vous la relation entre l’histoire et le cinéma ?
Je déplore la faible exploitation de notre histoire à travers les médias modernes, notamment le cinéma et le théâtre. Ce sont des moyens de communication idéaux pour transmettre notre histoire et notre mémoire collective. C’est notre référence de courage et de bravoure, malheureusement, je trouve que ce n’est pas assez. Ceci est lié à l’importance que nous accordons ou pas à ces moyens de communication. Dans un pays comme le nôtre, il ne faut pas que la culture soit la cinquième roue du carrosse, contrairement à d’autres pays et au rapport qu’ils entretiennent avec leur histoire et leur culture. Ils ont consacré des dizaines de films et de livres au sujet.
Certains font même l’éloge de leurs empereurs alors que nous n’avons aucun film sur l’Emir Abdelkader. Cela n’est pas normal. La relation étroite entre l’histoire et le cinéma est capitale, mais il y a un travers dont il faut se méfier. Ce n’est pas parce qu’on fait du cinéma qu’on peut se permettre tout ce qu’on veut.
Peut-on introduire des éléments de fiction dans un film sur l’histoire ?
Absolument pas. La fiction est permise dans certaines limites mais elle ne doit pas dépasser les faits historiques. Un cinéaste n’a pas le droit de faire un film dans lequel il va montrer des passages en contradiction avec des vérités historiques avérées. C’est une ligne à ne pas franchir. Toutefois, le réalisateur ou le cinéaste peut se permettre une liberté là où l’histoire ne nous a pas laissé d’écrits. Par exemple, l’histoire ne dit pas comment Lalla Fatma N’Soumer ou Boubaghla s’asseyaient pour manger, quelle taille ils faisaient, quelle couleur ils préféraient, comment ils marchaient, etc. C’est à ce moment où la fiction peut intervenir puisque l’histoire ne nous renseigne pas.
On dit que l’histoire, surtout celle de la guerre de Libération, a beaucoup inspiré nos cinéastes. Quel regard portez-vous sur toute cette production ?
Oui, mais il ne faut pas oublier qu’avant la guerre de Libération nationale, il y avait des résistances populaires au 19e siècle. C’est grâce aux écrivains et aux artistes que l’histoire de notre résistance est connue. Il faut aussi rendre hommage aux militants politiques qui ont combattu le colon, d’où la nécessité de faire aussi des films sur ces personnalités politiques.
Dispose-t-on d’assez de moyens pour développer davantage l’industrie cinématographique?
Il est clair que sans moyens, rien ne peut se faire. C’est un travail indispensable pour transmettre notre histoire et notre mémoire à la jeune génération, mais la manière de le faire est capitale. Si l’on fait un film sur une personnalité qui a une place importante dans l’imaginaire de la société et que le cinéaste écrit un mauvais scénario ou ne fait que détruire cette image, cela ne va pas. Donc, il faut respecter l’image que la société donne à ces personnalités.
Pour répondre à la demande du public, nous avons besoin de moyens pour écrire le scénario, la préparation, le tournage, le transport, etc. Aujourd’hui, notre jeune génération avec les moyens technologiques a des références de haut niveau. Si l’on veut capter l’attention de notre jeunesse, il faut des films de haut niveau. La culture ne doit plus être considérée comme un accessoire. Dans un pays aussi grand que l’Algérie, la culture est fondamentale pour la transmission de nos valeurs et la préservation de la mémoire.
Entretien réalisé par Samira Belabed
In HORIZONS
Il a réalisé de nombreux films, dont «Fadhma N’Soumer», «Bouzaine El Kalai», «El Manara» et «Machaho». Belkacem Hadjadj, également acteur, revient, dans cet entretien, sur l’importance du développement de l’industrie cinématographique pour la préservation de la mémoire collective et de l’histoire. Il souligne l’importance du respect des faits historiques et du recours à la fiction là où l’histoire ne fournit pas de détails précis et plaide pour le traitement de toutes les périodes historiques. Il insiste enfin sur la mobilisation de grands moyens humains et financiers.
Vous avez réalisé deux films à connotation historique, «Fadhma N’Soumer» et «Bouziane El Kalai». Comment percevez-vous la relation entre l’histoire et le cinéma ?
Je déplore la faible exploitation de notre histoire à travers les médias modernes, notamment le cinéma et le théâtre. Ce sont des moyens de communication idéaux pour transmettre notre histoire et notre mémoire collective. C’est notre référence de courage et de bravoure, malheureusement, je trouve que ce n’est pas assez. Ceci est lié à l’importance que nous accordons ou pas à ces moyens de communication. Dans un pays comme le nôtre, il ne faut pas que la culture soit la cinquième roue du carrosse, contrairement à d’autres pays et au rapport qu’ils entretiennent avec leur histoire et leur culture. Ils ont consacré des dizaines de films et de livres au sujet.
Certains font même l’éloge de leurs empereurs alors que nous n’avons aucun film sur l’Emir Abdelkader. Cela n’est pas normal. La relation étroite entre l’histoire et le cinéma est capitale, mais il y a un travers dont il faut se méfier. Ce n’est pas parce qu’on fait du cinéma qu’on peut se permettre tout ce qu’on veut.
Peut-on introduire des éléments de fiction dans un film sur l’histoire ?
Absolument pas. La fiction est permise dans certaines limites mais elle ne doit pas dépasser les faits historiques. Un cinéaste n’a pas le droit de faire un film dans lequel il va montrer des passages en contradiction avec des vérités historiques avérées. C’est une ligne à ne pas franchir. Toutefois, le réalisateur ou le cinéaste peut se permettre une liberté là où l’histoire ne nous a pas laissé d’écrits. Par exemple, l’histoire ne dit pas comment Lalla Fatma N’Soumer ou Boubaghla s’asseyaient pour manger, quelle taille ils faisaient, quelle couleur ils préféraient, comment ils marchaient, etc. C’est à ce moment où la fiction peut intervenir puisque l’histoire ne nous renseigne pas.
On dit que l’histoire, surtout celle de la guerre de Libération, a beaucoup inspiré nos cinéastes. Quel regard portez-vous sur toute cette production ?
Oui, mais il ne faut pas oublier qu’avant la guerre de Libération nationale, il y avait des résistances populaires au 19e siècle. C’est grâce aux écrivains et aux artistes que l’histoire de notre résistance est connue. Il faut aussi rendre hommage aux militants politiques qui ont combattu le colon, d’où la nécessité de faire aussi des films sur ces personnalités politiques.
Dispose-t-on d’assez de moyens pour développer davantage l’industrie cinématographique?
Il est clair que sans moyens, rien ne peut se faire. C’est un travail indispensable pour transmettre notre histoire et notre mémoire à la jeune génération, mais la manière de le faire est capitale. Si l’on fait un film sur une personnalité qui a une place importante dans l’imaginaire de la société et que le cinéaste écrit un mauvais scénario ou ne fait que détruire cette image, cela ne va pas. Donc, il faut respecter l’image que la société donne à ces personnalités.
Pour répondre à la demande du public, nous avons besoin de moyens pour écrire le scénario, la préparation, le tournage, le transport, etc. Aujourd’hui, notre jeune génération avec les moyens technologiques a des références de haut niveau. Si l’on veut capter l’attention de notre jeunesse, il faut des films de haut niveau. La culture ne doit plus être considérée comme un accessoire. Dans un pays aussi grand que l’Algérie, la culture est fondamentale pour la transmission de nos valeurs et la préservation de la mémoire.
Entretien réalisé par Samira Belabed
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